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mardi 7 janvier 2020

« Former des enseignants inclusifs
Perspectives comparatistes internationales »
Présentation
- Spirale 65-1 (2020)

Sommaire Spirale 65-1

Cairn

Sommaire Spirale 65-2

Régis MALET
Cui BIAN

La prise en compte de la diversité dans les classes est à l’agenda de la plupart des pays développés, en Europe et au-delà (Commission Européenne, 2012 ; OCDE, 2010 ; UNESCO, 2009, 2012). L’inclusion ne concerne désormais plus seulement l’intégration des enfants ayant des besoins particuliers visibles dans les écoles et les classes ordinaires, mais de tous les enfants. De même que la diversité ne se conjugue plus seulement avec de seules minorités visibles, les élèves sont reconnus comme sujets à inclure dans l’ordinaire de l’espace scolaire, en termes de culture, de genre, de capacité, de catégorie sociale (Soysal, 2002).
Loin d’une limitation de l’éducation inclusive à l’éducation spéciale, de plus en plus de politiques, internationales et nationales, mais aussi de recherches sur l’équité et l’inclusion dans le champ de l’éducation scolaire (Prudhome et al., 2016 ; Waitoller & Artiles, 2013) approchent l’exclusion des élèves non en référence à un facteur unique et stigmatisant, mais à l’interaction de facteurs multiples qui doit faire l’objet d’une attention renouvelée en formation initiale et continue d’enseignants.
L’inclusion ordinaire, ainsi reconnue dans un sens extensif, concerne dès lors tout enfant ayant des capacités différentes, et exposé au risque d’échec scolaire, d’exclusion ou d’abandon en raison de caractéristiques personnelles, culturelles, sociales ou linguistiques (Majhanovitch & Malet, 2015). La dichotomie entre l’éducation spécialisée et l’éducation ordinaire s’efface progressivement dans de nombreux pays, le plus souvent sous l’effet de politiques supranationales (Commission Européenne, OCDE, UNESCO), adressant de fait de nouveaux défis pour la formation des enseignants : celui de préparer et accompagner des enseignants en capacité d’accompagner les élèves dans l’actualisation de leur potentiel propre d’apprentissage.
Cette approche à la fois plus globale et ordinaire de l’inclusion telle que promue par l’UNESCO (2013) entend contribuer à renforcer les compétences des enseignants grâce à une préparation ancrée dans la recherche et l’expérience pratique pour développer des attitudes positives à l’égard du potentiel des enfants issus de milieux divers. L’inclusion prend place dans un programme global de justice sociale soutenu par les politiques transnationales de promotion des droits des enfants (la Convention des Nations Unies sur les droits de l’enfant, 1989), jugées prioritaires par les grandes organisations internationales (Déclaration de l’UNESCO à Salamanque, 1994 ; UNESCO, 2009 ; OCDE, 2005 ; OMS, 2009).
C’est dès lors, au-delà des mots d’ordre, la capacité de l’école et de ses enseignants à renforcer à la fois la différenciation, l’intégration et la cohésion sociale qui est interrogée, non seulement en principes, mais aussi et surtout en termes d’action publique, de dispositifs et de pratiques dans les écoles et dans les classes.
Ce mouvement global promeut en effet l’idée selon laquelle les enseignants ont vocation à devenir, au-delà de leur mission de transmission de savoirs et de biens culturels, des agents clés de changement dans le sens de l’inclusion et de la justice sociale, et doivent être équipés en conséquence d’une telle ambition, en particulier dans des contextes éducatifs et sociaux dans lesquels le lien social par l’école se délite et les inégalités sociales s’aggravent.
Le défi pour la formation initiale des enseignants est désormais de doter les enseignants des aptitudes, capacités, connaissance et compétences propres à favoriser la mise en œuvre efficace des politiques d’éducation inclusive (Hattie, 2009 ; Graham & Scott, 2016 ; Philpot, Furey & Penny, 2010). Dans ce contexte, et malgré une prise de conscience massive au niveau international de ce que la formation des enseignants est le levier nécessaire pour promouvoir en contexte scolaire l’éducation inclusive (Forlin & Chambers, 2011), les néo-enseignants apparaissent très insuffisamment préparés pour faire face à la diversité croissante des classes, et, faute de formation initiale et continue, peinent à s’adapter et à se développer professionnellement dans ce sens, pour le bien-être des élèves comme pour leur propre sentiment d’auto-efficacité (Bergugnat, Dugas & Malet, 2018 ; Donnelly, 2010 ; Hay, Smit & Paulsen, 2001).
Parallèlement, on constate que les recherches internationales et comparatives sur la préparation effective des enseignants à l’inclusion des élèves ne sont pas encore très développées (Sawhney, 2016). La raison peut en être que les pays développent des approches très distinctives de la justice et de l’inclusion scolaires, et de la formation des enseignants dans cette direction ; aussi bien, la faible mise en œuvre de dispositifs dédiés au soutien et à l’accompagnement professionnel en faveur de l’inclusion de tous les élèves peut expliquer l’état débutant de la littérature de recherche sur le sujet. De fait, bien que diverses politiques traitant de différents aspects de l’éducation pour l’inclusion se déploient, elles sont souvent discrètement mises en œuvre et paraissent assez déconnectées les unes des autres, n’étant pas reliées dans un vaste cadre d’intelligibilité de la formation des enseignants à une éducation inclusive (Englebrecht & Savolainen, 2014).
Beaucoup a déjà été écrit sur l’importance du contexte en éducation comparée (Alexander, 2000 ; Crossley 2009 ; Harris & Jones 2018 ; Wallenhorst 2017), y compris dans le domaine de l’éducation inclusive (Malet & Garnier 2020 ; Garnier, Derouet & Malet 2020 ; Bian & Malet 2017). Toutefois, peu d’études fournissent une analyse spécifique de l’influence des contextes en termes de formation d’enseignants inclusifs, de pratiques professionnelles et de formation locales. Peu de recherches ont étudié les processus d’apprentissage individuels et collectifs susceptibles de favoriser ou d’entraver l’inclusion scolaire dans différents contextes éducatifs (Tatto, 2011). La plupart sont des études de cas uniques ou des descriptions des politiques d’éducation pour l’inclusion scolaire ; de sorte que le lien entre les politiques et les dispositifs de formation et leurs effets croisés dans les contextes éducatifs est encore peu exploré (Naraian, 2014).
Les comparaisons internationales peuvent pourtant être instructives pour éclairer les continuités et discontinuités entre les actions priorisées et affichées par les politiques publiques, et les réalisations effectives en contextes scolaires. Ainsi aux États-Unis ou en Chine, il a été montré que la formation à l’inclusion scolaire pouvait être soutenue mais également entravée soit par des ressources et des obs-tacles contextuels, soit par des politiques, par des médiations institutionnelles ou organisationnelles (Naraian, 2014). Dans certains pays comme la France ou l’Italie, une focalisation disciplinaire encore dominante dans le cursus de formation initiale des enseignants peut limiter la formation à des compétences transversales néanmoins très affirmées, même s’il existe dans ces pays une obsession coupable de la différence culturelle (Maritano 2002 ; Soysal & Szakács, 2012).
Dans d’autres pays qui sont travaillés par d’autre référents politico-administratifs, comme la Grande-Bretagne ou le Canada, l’inclusion de tous les apprenants par la différenciation est un objectif ancien et nourri depuis longtemps non seulement par des recommandations mais aussi par des évaluations (Department of Education, 2011). En France, les principes républicains s’opposent à toutes les formes d’intolérance et de discrimination à l’école. Cependant, ce modèle peut constituer un obstacle à la reconnaissance de la diversité culturelle, linguistique ou religieuse dans l’école française (Soysal & Szakács, 2012). Depuis 2013, les questions relatives à la diversité culturelle et sociale sont abordées dans le cadre de cours d’éducation à la citoyenneté et à l’éducation civique et reposent sur la transmission des valeurs républicaines, l’ouverture à l’autre et le respect des différences dont ne sont que peu interrogés les modalités de mise en œuvre et les effets en contextes scolaires.
À l’ère de la mondialisation, la diversité est devenue une composante de nos sociétés. Approcher les politiques éducatives et de formation des enseignants dans leur ambition affichée de promouvoir l’inclusion scolaire et la justice sociale invite à examiner les formes de reconnaissance et d’intégration des individus au regard de leurs caractéristiques, et de prise en charge par l’éducation publique de la diversité sociale et culturelle qui composent les sociétés. Ce numéro de Spirale – Revue de Recherches en Éducation se propose d’apporter un regard international et comparatiste sur cette problématique, en interrogeant l’évolution des conceptions, politiques et dispositifs de formation des enseignants dans le sens d’une éducation inclusive.
La question posée est celle de la volonté et de la capacité des systèmes éducatifs à mobiliser et à former ses enseignants, en lien avec tous les acteurs de la communauté éducative, dans le sens effectif de l’inclusion scolaire de tous élèves et de la cohésion sociale dans les écoles publiques. Ce dossier, composé de deux volumes, entend proposer un état croisé des choix politiques, des pratiques et des dispositifs déployés dans différents contextes nationaux et locaux en matière de formation des enseignants à la diversité des élèves et dans le sens d’une intégration de tous dans les apprentissages.
Il est soutenu par des questions clés qui ont orienté les contributions de recherche ici rassemblées :
 quelles conceptions locales de l’éducation inclusive et de la formation des enseignants dans cette direction ?
 quelles continuités et discontinuités entre les politiques d’inclusion scolaire et les politiques, dispositifs et pratiques en formation d’enseignants inclusifs ?
 quelles compétences inclusives visées des enseignants en formation initiale et continue et quelles ressources et modalités pour leurs mises en œuvre ?
 quels contenus, quels déploiements curriculaires, quels soutiens et quels liens avec/entre les matières scolaires sur cette question ?
 quelles croyances et attitudes des enseignants, qu’il s’agisse d’orientations conceptuelles individuelles ou collectives, à l’égard de l’équité et de l’inclusion scolaire ?
 quelle organisation du travail éducatif dans les établissements, quelles pratiques et quels ethos professionnels pour quelles missions inclusives des enseignants et éducateurs ?
 quels liens entre les écoles, les centres de formation des enseignants et la communauté éducative élargie ?

L’ambition générale de ce dossier est de mieux comprendre comment une commune ambition d’inclusion scolaire, au-delà des mots d’ordre et de principes humanistes largement partagés, se déploie globalement, nationalement et localement dans des politiques, des dispositifs et des pratiques de formation initiale et continue des enseignants, et avec quels effets. Ce numéro thématique de la revue Spirale rassemble des contributions de chercheurs dans les domaines de l’inclusion scolaire et sociale et de la formation des enseignants intéressés par le croisement des regards et des contextes sur ces thèmes.

Les contributions rassemblées dans ce premier des deux volumes [1] composant ce dossier offrent une lecture de la problématique de la formation des enseignants en termes d’inclusion scolaire et sociale envisagée sous l’angle des politiques, des pratiques et des dispositifs éducatifs et de formation, dans des espaces nationaux et des aires géoculturelles et territoriales variées, allant de l’Europe à l’Asie, en passant par les Amériques et les territoires ultramarins. Ces contributions constituent autant d’analyses et de témoignages des formes locales d’appropriation de la notion d’inclusion en éducation, des expériences menées en formation d’enseignants en milieu spécialisé ou ordinaire, des politiques publiques qui en rendent compte et des débats nationaux qu’elles suscitent.
La contribution de José Amiama, Carine Reydy et Patrick Urruty propose tout d’abord une comparaison entre des dispositifs inclusifs menés des trois établissements transfrontaliers en France et en Espagne. Prenant appui sur une analyse croisée des textes officiels et sur une étude qualitative menée auprès de professionnels dans les trois établissements, l’étude révèle que le dispositif français tend à produire des formes de prise en charge d’élèves en situation de handicap qui se déploient en marge de l’institution scolaire ordinaire, dans des « classes à part », ce qui conduit les auteurs à questionner son adéquation même avec les principes d’une éducation inclusive. La comparaison des pratiques dans les trois établissements transfrontaliers révèle un besoin de formation des enseignants sur les questions liées à l’école inclusive, une nécessité de professionnalisation des accompagnants d’élèves à besoins éducatifs particuliers.
Florence Savournin, Emmanuelle Brossais, Myriam de Leonardis, Émilie Chevallier-Rodrigues et Amélie Courtinat-Camps interrogent l’expérience de l’inclusion scolaire, du point de vue des professionnels exerçant en collège, en étudiant les effets de formation des focus group dans le cadre de l’implantation d’un dispositif Ulis dans un collège. Le dispositif mené auprès d’enseignants, de personnels de vie scolaire et d’administratifs fait émerger plusieurs modalités d’articulation recherche-formation propres à alimenter des dispositifs de formation continue sur la scolarisation des élèves en situation de handicap pour des enseignants généralistes.
Dans leur contribution, Magdalena Kohout-Diaz, Isabelle Noël et Serge Ramel, étudient l’écart entre les enjeux propres à une éducation inclusive et les représentations des enseignants en formation initiale. Fondée sur deux études qualitatives, menées en France et en Suisse, l’étude croisée des représentations des en-seignants examine d’une part les représentations professionnelles d’enseignants français en formation initiale à propos de l’inclusion scolaire des élèves à besoins éducatifs particuliers, et d’autre part et pour le cas de la Suisse, interroge la formation à des pratiques pouvant prendre en compte la diversité des élèves. Des deux enquêtes, les auteurs concluent sur l’impérieux besoin qui demeure de repenser la formation initiale des enseignants, en partant des représentations des enseignants en devenir et en travaillant à l’examen des conditions concrètes d’accessibilisation des contextes éducatifs et scolaires.
Anne Mithout étudie dans sa contribution la politique mise en place au Japon dite d’« éducation de soutien spécialisé » qui vise à favoriser l’inclusion des élèves en situation de handicap en milieu ordinaire. Cette politique se traduit en particulier par un partage de compétences accru entre écoles ordinaires et écoles spécialisées, avec pour horizon d’attente la disparition du métier d’enseignant spécialisé en tant que profession spécifique, en parallèle du développement des compétences liées au handicap de tous les enseignants. La contribution d’Anne Mithout présente les résultats d’une enquête de terrain menée au Japon qui analyse les modalités de la coopération entre milieu spécialisé et milieu ordinaire, éclairant à la fois les bénéfices et les difficultés soulevées par la disparition du modèle de l’enseignement spécialisé comme expertise.
Elisabeth Issaieva et Rosette Scipion explorent ensuite les conceptions et les pratiques des enseignants spécialisés et ordinaires en Guadeloupe, contexte caractérisé par une diversité culturelle et linguistique et socioéconomique. Sur la base d’un dispositif de recherche mixte, combinant questionnaire et observation filmée, fondée à la fois sur les pratiques déclarées et effectives afin de saisir comment les besoins éducatifs des élèves sont pris en charge, l’enquête menée auprès des enseignants spécialisés et ordinaires permet aux auteurs de proposer des analyses comparatives mettant au jour des conceptions et des pratiques des enseignants ordinaires et spécialisés qui se différencient sur un ensemble de démarches pédagogiques et didactiques ainsi que sur la perception des difficultés d’appren-tissage.
Dans sa contribution, Philippe Tremblay s’intéresse à la formation initiale des enseignants en rapport avec l’inclusion scolaire, dans une perspective comparatiste pancanadienne. L’étude comparée propose, à partir de l’analyse de textes législatifs, des politiques et des normes dans les dix provinces et les trois territoires, d’identifier et de caractériser des modèles de formation ainsi que les compétences/normes pour la formation des enseignants à l’inclusion scolaire. Les résultats montrent une claire division entre modèle successif et modèle simultané dans la formation dans les provinces et territoires canadiens, et, s’agissant de la production de compétences et normes pour les enseignants, des positionnements différents en rapport à l’intégration/inclusion et par rapport à une population spécifique et à un collectif.
Valentina Crispi s’intéresse ensuite à la formation des enseignants à l’accueil scolaire des enfants de migrants. À partir d’une étude comparative internationale – France, Italie, Suisse – sur les politiques éducatives nationales, les dispositifs pédagogiques et les pratiques déclarées de professionnels, l’auteur révèle les singularités nationales dans l’appropriation des recommandations supranationales, mais aussi comment on peut saisir des exigences communes quant à la réussite de cet accueil. En matière de formation, des pratiques collaboratives d’échanges entre les acteurs professionnels sont identifiées comme une condition décisive pour qualifier les besoins en formation concernant l’inclusion et l’éducation interculturelle, en même temps que le gage du développement d’une culture professionnelle enseignante mieux adaptée à l’accroissement des diversités culturelles dans les classes.
Corina Borri-Anadon, Gustavo Bicalho Gonçalves et Kelly Russo proposent ensuite une étude comparative de politiques éducatives entre le Québec et le Brésil contribuant en principes à une ambition commune de transformation sociale et d’équité par une éducation inclusive. Dans une perspective sociohistorique et critique, les auteurs examinent les politiques éducatives associées aux vagues successives du paradigme inclusif dans les deux contextes étudiés. Conçues comme des interprétations locales de ces injonctions internationales, ces politiques témoignent pour les auteurs de tensions en matière de prise en compte réelle de la diversité au sein de la formation du personnel enseignant, qui sont révélatrices d’attentes et de contraintes communes et permettent de contribuer à une meilleure compréhension de l’incidence des politiques inclusives sur la transformation du rôle et de la formation des enseignants.
Olivier Kheroufi-Andriot déplacent ensuite le regard vers une École supérieure du professorat et de l’éducation (ESPE), au sein de laquelle une situation de formation a permis d’analyser l’activité d’enseignants stagiaires du premier degré de l’enseignement français. Comparés aux résultats d’une recherche doctorale ayant pour objet l’analyse de l’activité d’accompagnement d’enseignants plus expérimentés confrontés à l’inclusion d’enfants en situation de handicap dans leur classe et leur établissement scolaire, l’approche comparative de ces deux enquêtes sur l’activité enseignante permet de proposer des perspectives pour la formation d’enseignants inclusifs, notamment par une meilleure articulation entre situations de formation et situations de travail et d’une articulation des situations de forma-tion d’accompagnants dans une logique pluricatégorielle.
Rafael Conde Barbosa et Vera Maria Nigro de Souza Placco rendent ensuite compte dans leur contribution des résultats d´une recherche sur les modalités de mise en œuvre d’une politique publique au Brésil, visant à intégrer tous les acteurs scolaires, dans et hors les murs de l’école, appelée Programme d’Enseignement Intégral (PEI) et visant à promouvoir un élève qui soit un sujet autonome, responsable et solidaire. La recherche s’appuie sur des enquêtes ethnographiques menées dans deux écoles publiques situées dans la ville de São Paulo, ainsi que des entretiens avec tous les acteurs scolaires et examine les forces et les faiblesses de ce programme, aussi bien que de ces évolutions les plus récentes, qui en dévoient l’esprit et mettent en péril les bénéfices possibles.
Jean Labelle, Martine Leclerc et Philippe Jacquin s’intéressent ensuite aux communautés d’apprentissage professionnelle au Québec, questionnant les formes et modalités de travail en communautés d’apprentissage professionnelles et les conditions selon lesquelles celles-ci constituent une approche efficace de développement professionnel pour les enseignants désireux de participer à l’inclusion et la différenciation. La recherche a été menée dans une école primaire du Québec sur une période de quatre années et montre que cette forme d’organisation collaborative participe potentiellement au développement professionnel des enseignants, axé sur des pratiques d’inclusion et de différenciation et donnant lieu à une régulation collective de l’enseignement afin de répondre aux besoins de tous les élèves.
Lise Gremion, Nancy Granger et François Gremion inscrivent ensuite leur étude dans une perspective ethnographique et comparative Québec-Suisse, fondée sur l’écoute des enseignants et de ce que ceux-ci partagent de leurs difficultés relationnelles au quotidien de la salle des maîtres, révélant des similitudes dans les difficultés auxquelles les enseignants font face à différents niveaux des systèmes scolaires suisses et québécois, et des singularités dans les formes de prise en charge de ces difficultés de part et d’autre. Ces différences se comprennent au regard de ressources professionnelles et organisationnelles distinctes, que ce soit en termes de gestion de l’isolement des enseignants, de l’utilisation de stratégies de protection des liens professionnels ou de la construction et de l’impact du leadership de la direction sur la culture professionnelle et de l’école.
Hélène Geurts, Stéphane Duvivier et Antoine Derobertmasure approchent enfin la question de la formation des enseignants à l’inclusion scolaire en Bel-gique francophone. Au moment où le système éducatif de la Belgique francophone s’apprête à réformer la formation initiale des enseignants, les enjeux soulevés ici ont trait au développement de curricula répondant aux enjeux inclusifs de l’école et de l’enseignement. L’article prend appui sur une étude ayant recouru à l’observation directe des pratiques d’enseignement auprès d’une classe accueillant des enfants à besoins spécifiques. Les pratiques en situation « ordinaire » sont observées, décrites et comparées au contexte inclusif. Sur la base des résultats, l’article discute les recommandations relatives à la formation des enseignants et de promotion de compétences propres à développer des pratiques enseignantes inclusives.

Régis MALET
Institut Universitaire de France, Université de Bordeaux
Laboratoire Cultures, Éducation, Sociétés (LACES EA7437)
Cui BIAN
Université Normale de Shanghai
Institut de recherche en éducation comparée et internationale

Bibliographie

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Spirale - Revue de Recherches en Éducation – 2020 N° 65-1 (3-11)


[1Le premier volume, 65-1, sera imprimé pour les abonnés ; le second, 65-2, supplément hors abonnement, sera imprimé à la demande. Les 2 volumes seront accessibles sur Cairn.